Le vintage a fait son apparition dans les années 70. Pour autant, loin de s’essouffler, cette mode traverse aujourd’hui des secteurs divers et semble en perpétuelle augmentation. Dans le domaine de la mode, tandis que le marché du neuf baisse depuis plus d’une décennie, l’Institut Français de la Mode estime le marché de la seconde main à un milliard d’euros en France en 2019. Cette augmentation se traduit aussi par le développement du Salon du Vintage. La première édition date du début des années 2 000, et va de nouveau se développer dans un grand nombre de villes dans les prochains mois (La Rochelle, Paris, Bordeaux, Lyon, Nice, Annecy, etc). Qu’est-ce que traduit cet engouement pour le vintage ? Comment cela transperce aussi la sphère du tourisme ? Qu’est-ce qui se dessine derrière vintage et tourisme ?

Une tendance marquée dans l’univers de la mode

Particulièrement visible dans le monde de la mode, l’engouement pour le vintage a percé à travers l’effervescence des friperies dans toutes les villes, que ce soit en France ou à l’international. Chaque ville se dote alors de son tour des friperies ou de son top des friperies. On peut voir à titre d’exemple le top des friperies parisiennes. Le numérique a également été investi par cette tendance ! Les sites comme Vinted, qui compte aujourd’hui plus de 10 millions de membres en France, ou encore Videdressing son concurrent français, sont en constante augmentation. Cette tendance ne traduit pas seulement une consommation plus économique, ou l’amour pour la mode vintage. Pour certaines personnes, l’achat en friperie représente aussi des enjeux éthiques et écologiques, signe d’une prise de conscience de plus en plus généralisé.

Le « retro marketing » ou le marketing de la nostalgie

Vous n’avez pas pu y échapper, dans le marketing aussi, la mode est au rétro ou au nostalgique. Les pubs et produit vintage ont un écho fort et positif auprès du grand public. Plusieurs marques ressortent du placard, slogan, emballages, produits, d’une autre époque, à la recherche quelque part d’un âge d’or qui serait passé… Pour les destinations touristiques, ce marketing rétro se traduit entre autres par une production conséquente d’affiches vintages promouvant une ville, un pays, à travers des dessins simples s’appuyant sur des clichés intemporels. Une recherche est faite sur des valeurs sures, celles qui sont éprouvées, qui apportent sécurités et conforts, et qui permettent au consommateur de sortir d’une société pleine d’incertitudes.

Tourisme et vintage : ça donne quoi ?

Vous l’aurez compris le domaine du tourisme n’échappe pas à la mode du vintage. Certaines destinations font de leurs friperies des immanquables à visiter, d’autres axes leurs communications sur des cartes, affiches et autres supports visuels directement sortis des années 50.  Des opérateurs proposent également la location de voitures anciennes pour faire découvrir le patrimoine et les routes de leur territoire. En matière d’évènements, le vintage est également source d’inspiration. Outre le Salon du Vintage dont on a déjà parlé, on peut penser au festival Anjou Vélo Vintage. Cette manifestation propose sur plusieurs jours des randonnés à vélo vintage, un festival musical à base de soirée guinguette et un village de collectionneurs et artisans rétro. Les avis sur l’évènement font l’unanimité :

« Simplement magnifique ! Sourires et convivialité assurés ! Un retour dans le temps, et en prime le plaisir intense de réunir jeunes et vieux dans le respect et dans la joie ! Dur dur, le retour en 2019 … » commente Sylvie sur Facebook par rapport à l’édition 2019. James, un Anglais, semble tout aussi enthousiaste : « A magical experience. So much attention to detail; it was like being in a bicycling musical. An absolute joy. ».

Un évènement qui allie vintage et slow tourisme ? Ce n’est pas rien, qui plus est pour découvrir l’Anjou et son terroir !

 

Quel monde traduit la mode Vintage ?

Il va sans dire que cet engouement pour le vintage parle et nous dit des choses sur les aspirations de la société d’aujourd’hui. Mais de quels ordres sont-ils ? Cette mode, nous l’aurons compris ne doit pas être seulement vu comme une évolution des goûts vestimentaires ou esthétiques de la société. Le retour au vintage peut être empreint de considérations écologiques, éthiques, mais également psychologiques. Et oui, la référence aux années 20 n’est, par exemple, pas sans conséquence! C’est faire référence à des années de liberté, d’insouciance, de libération… 3 mots qui sont bien utopiques pour nous … Et pourtant, avec l’essor du #vanlife de plus en plus de personnes cherchent à atteindre cette quête de liberté, d’aventure, de minimalisme, de slowlife !

L’engouement pour le vintage… une spécificité française ?

Et bien non, l’engouement pour le vintage ne se cantonne pas aux frontières ou à la population française. Une étude Thredup (une chaine de vêtement de seconde main nord-américaine) s’intéresse à la tendance vintage et l’achat de seconde main dans le monde de la mode. Et les chiffres parlent ! En trois ans, l’étude montre une augmentation de 20% des femmes prêtes à acheter des affaires de seconde main… Ce phénomène concerne toutes les générations, des femmes boomers (les plus de 56 ans) à celles de la génération Z (les 18 -24 ans). Il englobe aussi toutes les clientèles, de celles fréquentant les magasins de luxe à celle allant dans des enseignes bon marché.

Mais, cette manifestation se traduit aussi sur les territoires. Par exemple, la ville de Londres, réputée chez les fervents du vintage, a vu son musée des Marques et de la Publicité s’agrandir, et déménager pour un espace plus spacieux. Ce musée, retraçant l’évolution des grandes marques de consommation, expose plus de 12 000 packagings vintages et voit son nombre de visiteurs augmenter. Pour les destinations touristiques, l’engouement le vintage est aussi visible ! Le Boston Globe a récemment publié un article qui met en avant une hausse des voyages vers les destinations qui étaient populaires dans les années 50 et 60 : Route 66, Hawaii, Disneyland, et bien sûr Cuba…

Vintage et tourisme : effet de mode ou tendance de fond pour le tourisme ?

A l’heure de la modernité et de l’innovation, comment expliquer cette montée en puissance du vintage depuis les années 70 ? Ces deux opposés traduisent en fait deux utopies : « C’était mieux avant ! » ou « Ça ira mieux demain ! ». Le vintage et la nostalgie jouent un rôle de puissant ressort émotionnel. C’est le rêve de retrouver un monde rassurant, cela montre une difficulté à vivre le monde présent…

Alors entre ces deux utopies, le tourisme peut-il trouver sa place ?

En alliant vintage et tourisme, l’Anjou Vélo Vintage a bien trouvé une alliance entre modernité, en surfant sur l’itinérance douce et la nostalgie ! C’est en s’appuyant sur des tendances en plein essor dans les aspirations des clientèles touristiques, le tourisme vintage peut trouver les clefs pour ne pas être un simple effet de mode ! Mais, quelles sont ces aspirations ? C’est le fait de vouloir prendre son temps, de réaliser des expériences hors des sentiers battus, ou encore de retrouver un mode de vie plus « authentique »… D’autant plus que c’est un tourisme qui attire une clientèle variée. Des retraités qui ont l’impression de retrouver leur jeunesse aux plus jeunes qui fantasment sur des périodes qu’ils n’ont pas vécues, le panel est très large !

Vers le vintage comme identité territoriale ?

Dans le cas français, vintage et tourisme fonctionnent donc très bien autour d’évènements ou d’activités ponctuelles. Pourtant, cette association semble avoir encore du mal à s’intégrer pleinement à l’identité territoriale d’une destination. On peut alors penser à l’association Mémoire de la National 7 qui tente de valoriser cette route mythique des départs en vacances des Français vers le Sud, avant la création de l’autoroute. Le musée et les expositions que les passionnées de l’association ont créé, restent aujourd’hui peu connu et se concentre sur la commune à Piolenc. L’étendue du territoire traversé par cette route, et donc la multitude d’acteurs concernés sont peut-être un frein à faire de cette route une identité territoriale.

A l’inverse, la Grande Motte semble tirer son épingle du jeu du vintage. Après avoir vu son architecture et son tourisme de masse être décrié pendant des années, cette destination ne cesse de monter en gamme. Un changement d’image radical qui s’est justement appuyé en partie sur le label « Patrimoine du 20ème siècle » qui a permis de valoriser cette architecture vintage, typique de la Grande Motte. Certains acteurs rêvent encore plus haut : obtenir le label du patrimoine mondial de l’UNESCO.

Alors la tendance vintage ira-t-elle jusqu’à traverser un des labels les plus prestigieux ? L’avenir nous le dira…