Quelles possibilités pour améliorer l’attractivité des Parcs nationaux français ?

Pour ce dernier apéro Innov-ID de l’année 2014, nous avons décidé de nous pencher sur les modèles de gouvernance dans les Parcs nationaux et voir quelles sont les possibilités pour améliorer l’attractivité touristique de ces derniers.

Depuis le début des années 2000, on observe un engouement de plus en plus fort de la part des touristes à aller visiter et surtout séjourner dans les différents Parcs Nationaux. Envie de verdure,  d’authenticité et de se reposer dans un environnement calme hors du tumulte de la vie citadine sont autant caractéristiques auxquelles peuvent répondre nos Parcs Nationaux.

Néanmoins les Parcs nationaux à la française ont-ils aujourd’hui pris la mesure de cette engouement ? Et que pourrait-on faire pour améliorer l’attractivité de ces territoires à forte potentialité touristique ?

Tout d’abord, avant de passer au vif du sujet, rappelons les principes fondateurs des Parcs nationaux.

Un Parc national est un territoire sur lequel la conservation de la faune, de la flore, du sol, du sous-sol, de l’atmosphère, des eaux d’un milieu naturel présentent un intérêt spécial.

Il importe de le préserver contre toute dégradation et de le soustraire à toute intervention artificielle susceptible d’en altérer l’aspect, la composition et l’évolution.

En France, il existe en 2014 dix parcs nationaux : Vanoise (1963), Port-Cros (1963), Pyrénées (1967), Cévennes (1970), Ecrins (1973), Mercantour (1979), Guadeloupe (1989), La Réunion (2007), la Guyane (2007) et les Calanques (2012).

Le Parc national se compose de deux zones :

  • Une zone centrale : le cœur du Parc national, véritable “ garant du capital naturel du Parc ”, constitue la base de la charte : un régime de haute protection y est garanti par la législation des Parcs nationaux et par le décret de création propre à chaque Parc national. Cette protection active est pilotée par l’établissement public du parc national, sous l’égide de son conseil d’administration à majorité locale.
  •  Une zone d’adhésion : La libre adhésion de chaque commune à la charte permet au Parc national de se constituer, par agrégation des territoires autour du cœur, formant ainsi “ l’aire d’adhésion ”. Les communes et les entreprises adhérent  à un  projet collectif (pour une durée de 15 ans). Dès lors, ce projet collectif résulte d’un engagement en cohérence avec les orientations négociées dans la charte, notamment en matière d’urbanisme, de circulation et de publicité. Mais aussi et surtout, engagement dans une dynamique collective, sur un projet cohérent, qui valorise leur identité autour d’un monument naturel.

En France, le modèle de gouvernance des Parcs nationaux concernant les projets touristiques est très (trop ?) protectionniste. En effet, le fonctionnement des PN repose sur 3 grands objectifs :

• La protection de la biodiversité, mission essentielle que la collectivité nationale est en droit d’attendre d’un Parc National ; cependant depuis la loi de 2006, un parc national est également chargé de protéger son patrimoine culturel souvent très remarquable ;

 • La bonne gouvernance qui vise à assurer un meilleur fonctionnement des institutions et à renforcer les liens avec les acteurs locaux ;

 • L’excellence de la gestion du patrimoine et aussi de l’accueil des publics, pour lesquels les parcs nationaux doivent être à la hauteur de la dimension symbolique qui les distingue des autres formules de protection.

 Au niveau du tourisme, certains Parcs nationaux comme le Parc national des Cévennes et le Parc national du Mercantour ont bien compris que le tourisme est porteur de valeurs (ajoutées mais pas seulement) pour les parties prenantes des territoires s’il est géré de manière responsable mais aussi et surtout innovante.

Le Parc National des Cévennes est, par exemple, particulièrement bon sur les offres d’hébergements insolites (cabanes dans les arbres, yourtes, etc.). De son côté le Parc National du Mercantour développe des offres d’activités totalement dans le vent et originales, parmi lesquelles le séjour « soigneur d’un jour » fait figure d’exemple. En effet, durant ce séjour, vous aurez l’opportunité de prendre la peau d’un soigneur et de vous retrouver nez à nez avec des loups !

Néanmoins, malgré quelques bonnes pratiques l’offre touristique dans les Parcs nationaux français reste encore trop classique et n’est donc pas encore au fait des évolutions du comportement des consommateurs.

L’écomusée, par exemple, figure de proue de l’accueil des visiteurs dans l’ensemble des PN  est symptomatique du besoin de renouveau dans la conception des structures d’accueils aux publics ;

De la même manière, concernant l’hébergement,  très peu de Parcs Nationaux se positionnent sur un vrai renouvellement de leur offre d’hébergement. Dans la majeure partie des cas, les sites webs des Parcs Nationaux présentent des séjours dans des Gites ruraux (souvent labellisés gîte de France), du logement à la ferme (via le réseau bienvenue à la ferme) ou  encore des séjours dans des petites auberges adhérentes à la charte du Parc.

Enfin concernant la promotion, les Parcs nationaux français sous utilisent encore grandement les outils social media : Facebook, Twitter, Youtube, etc.

Du côté de l’oncle Sam, le National Park Service équivalent américain de la fédération des Parcs nationaux a pour vocation à la fois de faire découvrir les Parcs nationaux américains aux internautes et sert aussi  de plateforme pour planifier son séjour dans l’un des Parcs !

En fait de manière générale, nos voisins américains ont un modèle de gouvernance complètement décomplexé, tourné vers la commercialisation des séjours touristiques à haute valeur ajoutée, voire vers de l’écotourisme de luxe.

Par exemple, comme on peut le voir ci-dessous le parc national du grand canyon a développé une offre hôtelière (exclusive et de luxe : puisque cet hôtel est unique en son genre et est le seul présent dans le cœur du Parc) pour un séjour de découverte au plus près des sites emblématiques.

De même, les parcs naturels américains ont pleinement pris conscience que les réseaux sociaux et internet peuvent s’avérer être une arme redoutable dans la création d’une communauté en ligne qui devient de surcroît, un vivier d’ambassadeurs en ligne promouvant de manière gratuite les Parcs nationaux.

Au final, le modèle de gouvernance américain permet, par le biais du tourisme, de développer un modèle économique  vertueux. Néanmoins, le revers de la médaille est que l’entrée et les visites dans les PN américaines sont payants (et pas qu’un peu). Du coup, les parcs nationaux américains ne répondent plus vraiment à l’objectif de sensibilisation du plus grand nombre.

Partant du postulat de ces deux modèles de gouvernance du tourisme dans les parcs nationaux,   comment pouvons-nous améliorer l’attractivité de nos PN français sans pour autant renter dans la dérive mercantile des PN à l’américaine ?

 Voici quelques idées émises durant ce 5ième apéro Innov-ID :

 Au niveau du développement de l’offre :

  • Hébergements :

 Beaucoup de participants ont plébiscité la possibilité du développement des offres via les infrastructures en HLL (habitat légers de loisirs). En effet les cabanes dans les arbres, les yourtes et autres hébergements insolites étant à la fois écologiques et dans le vent sont selon eux, une solution innovante qu’il faut exploiter et pouvant répondre à la problématique de la saisonnalité du tourisme.

De même, vu que le marché du cyclotourisme fait partie des marchés les plus dynamiques, l’idée fut aussi avancée de développer des « hôtels – repairs café » dans lesquels les touristes peuvent séjourner et réparer (ou entretenir) leurs vélos. En effet beaucoup de « VTTistes » sont aujourd’hui des excursionnistes, à qui il faut proposer des services et des activités annexes afin qu’ils restent et consomment un peu plus sur le site.

Enfin, les participants ont présenté l’idée de revaloriser les offres d’hébergement classique (gites ruraux, auberges) en y intégrant de manière très poussé la démarche de la trame verte et bleue afin que chaque logement sensibilise de manière ludique les touristes à la protection de l’environnement.

  •  Activités : culturelles et ou sportives :

La plupart des participants ont rappelé que la gastronomie et les produits de terroirs font partie des attraits principaux de la venue des touristes. Dans ce cadre, l’idée de l’organisation de balades gourmandes avec une application mobile, permettant de faire découvrir dans le même temps les spécificités naturelles et culturelles seraient un véritable plus.

 Ensuite, au niveau de l’animation générale des sites, les participants ont remarqué que les Parcs nationaux français contrairement aux PN américains manquent de mise en scène. Par exemple, les uniformes des guides locaux, les infrastructures ne sont pas assez marquées  et ne permettent pas de développer l’imaginaire touristique inhérent aux différentes thématiques de chacun des Parcs. 

  • Accueil des visiteurs :

Faire des Parcs Nationaux une entité aidant à activer la coopération entre les différentes associations existantes autour d’un projet touristique, type : LPO, associations d’artisans, etc pour créer des offres de séjours innovantes et intégrant tous les aspects identitaires forts du Parc.

Améliorer les offres de transport dans le Parc, via des lignes de bus spéciales comme le font les américains dans leurs propres Parcs, par exemple. Ou encore, développer une itinérance ludique entre les différents lieux du Parc : Balades en calèches, téléphériques (quand cela  est possible), etc.

 Au niveau de la promotion

Valorisation des Parcs nationaux avec l’élaboration d’un calendrier d’événementiels innovants, rattaché à la fois avec ce qui plaît à l’heure actuelle et avec la culture locale.

De même, les participants ont aussi beaucoup plébiscité la mise en place de visites théâtralisées au abord du cœur du Parc comme cela se fait de plus en plus en milieu urbain, avec les spectacles de rue.

Enfin, il serait opportun d’améliorer la notoriété des Parcs via la possibilité de les rendre plus présents sur les différents quotidiens et magazines lus par la plupart des français.

  •   Stratégie webmarketing   :

Les participants ont proposé que les Parcs nationaux encouragent leur réseau d’hébergement et de restauration à soigner leur présence sur Tripadvisor qui est devenu la plateforme incontournable de choix des touristes concernant l’hébergement et la restauration. De plus, Tripadvisor vient développer un label interne appelé « greenleaders » permettant aux touristes de juger de la pertinence des hôteliers dans leur démarche de développement durable.

Enfin, il serait opportun que la fédération des Parcs nationaux puisse devenir aussi une centrale de réservation (avec un référencement naturel et payant travaillé)  permettant au touriste de planifier directement en ligne leurs séjours dans les parcs nationaux français.

Benjamin MALATERRE ,

Consultant  ID-Tourism

b.malaterre@id-tourisme.fr

www.id-tourisme.fr