L’excellence présentée dans un restaurant gastronomique comme Au Crocodile à Strasbourg que j’ai eu la chance de découvrir ce vendredi a fait remonter au fond de moi des valeurs importantes liées à l’expérience client. Bien sûr, c’est logique quand on déguste dans un restaurant étoilé de recevoir ce genre de service mais l’équilibre entre le professionnalisme et la convivialité ne devrait pas être uniquement l’apanage de ce genre de restaurant…

 

Photo: Gilles Pudlowski

 

Voyage, Convivialité et Storytelling au Crocodile

Je viens juste de dire au revoir à Sarah & Franck. Sarah a fini par dire « Oh, nous avons un petit cadeau pour vous remercier d’être venu, ce petit kouglof pour le petit déjeuner demain. » Tout au long du repas, Sarah n’était jamais bien loin pour s’occuper de nous, de venir discuter ou nous raconter quelques histoires sur l’établissement. Bien sûr, elle n’était pas seule. Franck excellait en cuisine pour nous offrir des mets des plus originaux, valorisant les patrimoines culinaires alsaciens à travers ses voyages asiatiques. Et, en salle, toute l’équipe venait pour nous présenter les plats et les vins dans une ambiance des plus agréables, sans avoir des tonnes. Je retiens surtout ce jeune sommelier, Pierre Jacob, venant nous présenter chaque accord met / vin avec une connaissance pointue, une passion de la première heure et une envie de nous faire voyager à chaque nouveau plat. Il pouvait nous raconter toutes l’histoires des vignerons qui se cachaient derrière les cépages, comme cet alsacien exilé à proximité d’Aix-en-Provence qui avait un accent provençal des plus prononcés malgré son origine alsacienne. Nous n’avions plus qu’à fermer les yeux pour se retrouver sur la Montagne Sainte Victoire.

 

L’excellence. Le mot est lâché. Bien sûr, nous sommes dans l’univers du luxe mais un luxe qui a changé. Le luxe qui valorise la qualité, la passion, le temps long et les produits du terroir. Je ne vais que rarement dans ce genre d’établissement. J’ai encore cette peur de déranger, d’être reçu comme un roi et que le staff en fasse beaucoup trop pour justifier le prix des plats et du vin. Ici, rien de tout cela. On part en disant « Au revoir Sarah. Merci Franck ! » Pendant tout le repas, il y a eu une certaine complicité qui s’est créée avec l’équipe. On est presque triste d’avoir raté un serveur pour lui dire au revoir à la fin du repas parce qu’il était en cuisine. C’est comme si on partait d’un repas chez des amis sans dire au revoir à tout le monde.

 

Manger n’est pas qu’une question de goût…

Mais alors, pourquoi cette convivialité, cette complicité, ce naturel, cet art de raconter des histoires sur les plats, sur l’établissement ou sur les vins, ne seraient que l’apanage des restaurants étoilés ?

On n’a pas besoin de faire de la haute gastronomie pour appliquer ces valeurs, garant d’un professionnalisme et d’une certaine vision de l’excellence. Souvent, quand je mange dans des restaurants engagés en faveur d’une cuisine maison, saine ou valorisant les circuits courts, je suis souvent déçu de ce que l’on me raconte. Manger n’est pas qu’une question de goût et de palais. Manger, c’est voyager. Et pour voyager, on doit nous raconter des histoires, nous embarquer dans cet avion pour aller déguster. Avec Franck, on est parti en Chine mais aussi au plus près des terroirs alsaciens. Avec Pierre, le sommelier, on est parti sur les bords de Loire juste après un passage à proximité de Banyuls dans les Pyrénées Orientales. On aurait aussi pu juste manger sans que notre esprit ne décolle…

Photo: VisitFrenchWine

La morale de cette histoire est simple. Le cerveau est totalement connecté à notre goût. Chaque professionnel est capable de comprendre cela. L’art de raconter des histoires et d’instaurer une ambiance conviviale au sein d’un restaurant ou d’un hôtel pour tendre vers une certaine excellence perçue par le client n’est pas quelque chose qui devrait être réservé aux établissements de luxe. Professionnels, c’est à vous d’instaurer et de partager ces valeurs auprès de votre staff. Vos clients vous remercient déjà par avance.

 

Guillaume Cromer, directeur ID-Tourism (Suivez-moi sur Twitter).