Cela doit bien faire la troisième année consécutive que la neige se fait attendre dans les stations de montagne pour les vacances de Noël. Les impacts du changement climatique sont de plus en plus fragrants. Ils décalent la saison hivernale et poussent les stations à être de plus en plus agiles, réactives, en mode start-up.

Concrètement, que fait-on ?

Le week-end dernier, les 17 & 18 décembre, la station de La Clusaz accueillait une étape de la Coupe du Monde de Ski de Fond… sans neige. Pour éviter l’annulation (et le risque potentiel de voir la Fédération Internationale de Ski ne plus faire de compétition prochaine sur la station), La Clusaz a mis toute son énergie pour créer une piste avec
les restes de neige tombées mi-novembre et la glace du lac d’à côté pour créer une sous-couche protectrice. Au final, la manche de Coupe du Monde fut maintenue dans une ambiance sans neige assez particulière. Le public était également au rendez-vous pour le plus grand plaisir des professionnels du tourisme et de l’hôtellerie.

Quelques jours avant …

Quelques jours avant cet événement sportif, je prenais la parole sur un webinaire organisé par le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE). En particulier sur le Programme cadre décennal sur le tourisme durable que l’on nomme 10 YFP dans le jargon. Le sujet : Pour une transition des aménagements des zones touristiques côtières et de montagne suite aux impacts du changement climatique.

Pendant que j’échangeais avec Gérard Ruiz, l’expert sur le tourisme dans les espaces insulaires et côtiers, je repensais à cet événement de La Clusaz. Habitant désormais au cœur des Alpes à Grenoble, je constate que ce manque de neige autour de moi a un impact sur l’économie. Quelques jours après l’épreuve de coupe du monde, Kilian Jornet, le fameux trailer catalan, écrivait ce post sur sa page Facebook.

Il posait LA bonne question : Faut-il s’adapter à la nature ou adapter la nature pour nous ?

Bien sûr, ici, nous parlons des sports de glisse en hiver mais au final cette question pourrait être généralisée à toutes les activités, tous les secteurs, industries, entreprises, etc.

Pendant le webinaire du PNUE (Retrouvez le sur Youtube), je présentais justement cette double nécessité face aux enjeux du changement climatique : adaptation & atténuation. Le tourisme de manière générale mais surtout en montagne, ce double objectif est nécessaire. D’un côté, les stations de montagne se doivent d’être exemplaires sur les questions d’atténuation en commençant tout simplement par réaliser un bilan carbone afin de construire,
avec les différentes parties prenantes du territoire, une véritable politique ambitieuse de lutte contre les émissions de gaz à effet de serre. Et cela passe par la question de l’isolation des bâtiments publics et privés, du chauffage,
de l’origine des énergies utilisées, de la réduction et de l’optimisation des consommations énergétiques (Qui a parlé de Smart Grids ?), de la réflexion sur la mobilité douce au sein des stations et sur la mobilité des visiteurs.

Pour travailler sur ces questions :

Il existe aujourd’hui un outil plus que pertinent avec le label Flocon Vert développé par Mountain Riders. Je suis persuadé que ce label sera demain une référence pour les stations en France et en Europe. A la même image que  Pavillon Bleu pour les stations balnéaires.

De l’autre côté, il y a la question de l’adaptation… Et là, on en revient à la réflexion de Kilian Jornet, que doit-on faire ? Car les stations pourraient très bien comprendre l’adaptation en utilisant les innovations, les technologies et les moyens financiers pour développer toujours plus de neige de culture. Element qui serait d’ailleurs soutenu par les pouvoirs publics. Mais n’est-ce pas reculé pour mieux sauter ? Ne faudra-t-il pas à un moment comprendre que les stations devront s’adapter et adapter le comportement de leurs clients à prendre conscience que l’on ne peut pas changer la nature et que bien d’autres activités de sport de montagne sont faisables si la neige manque…

Le cas de Tignes

A la fin du webinaire, je prenais justement l’exemple du fameux projet de Ski (et Surf) Indoor à Tignes nommé
Ski-Line. Ce projet a suscité un avis favorable a été émis le 25 novembre dernier par la commission Unités touristiques nouvelles (UTN) du comité de massif Alpes. Mais il a aussi suscité l’indignation des associations environnementales comme Mountain Wilderness. Ces derniers fustigent le projet : « C’est le stade ultime de l’absurdité. Ce projet est énergivore, consommateur d’eau, à l’opposé du développement durable. Il participe à la mort de la montagne par le réchauffement climatique et à l’artificialisation de la nature », estime Vincent Neirinck, de l’association Mountain Wilderness dans une interview à lire dans Le Parisien.

Pour autant, la Mairie de Tignes, sur son site Internet, veut justement montrer tout l’intérêt du projet sur les plans
sociaux et économiques. Ils soulignent les garanties des impacts environnementaux très faibles. On peut y lire notamment :

Mais au final, que voulons-nous pour l’avenir du tourisme de montagne ? Que voulons-nous pour l’avenir du tourisme ? Et enfin, que voulons-nous pour notre Planète ?

Je pense sincèrement qu’il est nécessaire que nous adaptations nos activités et surtout nos loisirs à la nature. Mais aussi en réduisant nos impacts sur le climat. Nous retrouverons ainsi un meilleur équilibre. A court terme, c’est le besoin d’adapter nos structures pour réduire l’impact de nos activités de loisirs sur le climat. En parallèle, il est vraiment nécessaire d’engager les politiques publiques aux échelles locale, régionale, nationale et européenne pour harmoniser les engagements. Nous éviterons donc la surenchère des stations pour des projets du tout-ski et dans une vision complémentaire, que ces mêmes autorités, poussent les stations à prendre de vrais engagements en faveur du climat. Enfin, le client comprendra qu’il faudra adapter ses activités en fonction de ce que la nature nous apporte. Non en façonnant la montagne et la nature de la manière dont il voudrait. Pour rappel, l’Homme n’a jamais gagné dans ce combat-là. C’est bien la Terre qui restera à la fin…

Guillaume Cromer, directeur ID-Tourism & Président Acteurs du Tourisme Durable (A suivre sur Twitter)

Vous êtes une station qui comprend les enjeux du développement durable et qui veut mettre en place une stratégie ? Cliquez-donc !