A travers nos différentes missions auprès des collectivités françaises, on pose régulièrement la question de l’ambition voulue pour l’économie touristique auprès des élus locaux. Question importante car elle va déterminer forcément la question de la croissance économique et des retombées générées par les visiteurs (excursionnistes et séjours). Or, bien souvent, faute de données concrètes, il est difficile de construire une ambition économique sans base de calcul ou si… au feeling… D’où l’importance de la donnée et de la mesure !

 

Comment faire une projection économique quand on ne sait pas clairement de combien on part…

« Quelles ambitions envisagez-vous pour le développement du tourisme sur votre territoire d’ici à 2023 ? »

« Quelle évolution annuelle du tourisme allons-nous chercher à travers cette stratégie de développement ? En matière de nuitées marchandes ? En retombées économiques directes ? En création d’emplois ? En investissement ? »

Voilà le genre de questions que nous posons régulièrement aux élus locaux quand il s’agit de les accompagner dans leur stratégie de développement touristique ou leur plan marketing stratégique.

Or, bien souvent, la réponse est difficile pour les élus. Difficulté dans la projection bien sûr à 5, 6 ou 10 ans (question de mandature ?) mais aussi problématique liée au manque de chiffres. Comment faire une projection économique quand on ne sait pas clairement de combien on part…

Mais pourtant, de partout, différents articles parlent de l’importance de la culture de la data, dans le privé mais aussi dans les collectivités locales. Déjà en 2015, on voyait apparaître des papiers mettant en avant l’importance du big data dans le domaine du tourisme. DataTourisme a vu le jour dernièrement avec le développement des Systèmes d’Information Touristique comme APIDAE ou Tourinsoft mais cela reste encore largement de la récupération de données de l’offre, froides alors que l’enjeu pour nous est beaucoup plus sur la question de la demande et de l’impact de la demande sur les territoires (taux d’occupation, panier moyen, retombées économiques, etc.). Etant donné l’attractivité dans le secteur privé des métiers de data scientist ou data cruncher, on se doute bien que les salaires au sein des collectivités locales ne vont pas attirer tout de suite les perles rares de la data. Et pourtant, les besoins sont criant au risque de créer une dépendance forte aux acteurs privés qui pourront mettre à disposition les riches données.

L’exemple du développement de la start-up VisitData le prouve. En récupérant de la donnée qualifiée de fréquentation sur les territoires, ils arrivent à construire des tableaux de bords sur mesure pour les collectivités afin de se doter de véritables outils de suivi de la fréquentation et, potentiellement, de faire évoluer les stratégies marketing et certaines opérations de promotion en conséquence.

Exemple de cartographie issue des données de Flux Vision Tourisme par Orange

 

Notre travail avec le CRT Occitanie

Actuellement, nous travaillons justement auprès du CRT Occitanie pour construire la stratégie marketing du tourisme de la nouvelle région est un beau contre-exemple car ils ont justement de la donnée en matière de fréquentation à travers Flux Vision Tourisme (FVT) mais aussi la collaboration avec VisitData.

En s’appuyant sur les différentes données disponibles en matière de bassins émetteurs, de destinations réceptives, de périodicité dans l’année, etc., on a pu construire des matrices périodiques de fréquentation, c’est-à-dire de préciser le pourcentage de fréquentation en fonction des différentes saisons touristiques et des marchés émetteurs ainsi que des destinations infras. Une vraie pépite quand on sait la nécessité de penser avec pertinence les choix marketing afin de toucher tel ou tel personas.

Notre travail consiste donc à faire évoluer ces matrices en fonction des ambitions économiques des élus et de l’état présent et futur de l’offre sur les territoires (une offre touristique n’est pas adaptable pour toutes les cibles et marchés…) mais aussi des tendances de fond des marchés émetteurs et de certaines externalités qui pourraient impacter des destinations infras (l’impact du changement climatique par exemple mais aussi la sur-fréquentation touristique…).

Ainsi, peut-on anticiper une croissance touristique en montagne pendant les vacances de Noël ou de printemps ? Doit-on chercher une croissance touristique l’été sur les côtes ? Sur quelle zone peut-on rechercher une croissance touristique sur les ailes de saison ? Les datas nous permettent de poser une base de réflexion pertinente avant de valider la typologie de croissance à rechercher avec les différentes parties prenantes d’un territoire (élus, socio-professionnels, techniciens des OGD, marques infras, etc.). Car oui, comment je l’ai déjà dit, la croissance pour la croissance ne doit pas être un but en soi. Il est important de réfléchir à la qualité de la croissance, c’est-à-dire qu’un territoire en manque de lits touristiques sera forcément limité à un moment donné, idem pour la question de l’accueil de touristes chinois ou russes en zone rurale si aucun des professionnels ne parlent de langue étrangère… Des choses logiques mais forcément à intégrer dans les échanges avant de construire cette matrice de croissance touristique détaillant avec précision la traduction des ambitions touristiques en ciblage fin des futures actions marketing.

 

Mesurer, évaluer, adapter la stratégie

Par la suite, grâce à la mesure et à l’évaluation des actions marketing et autres opérations de promotion de la destination, il sera possible de vérifier la pertinence des dépenses et de réajuster, chaque année, pour plus d’efficacité afin de mieux dépenser les budgets et l’argent public.

Or, pour cette vision rêvée, il est nécessaire d’avoir de la donnée dès le départ, de construire des études d’impact économique, de construire des tableaux de bords de suivi et de les intégrer dans le quotidien des techniciens des OGD. Et malheureusement, le chemin est encore un peu long à priori pour y arriver à ce jour dans les communautés de communes, en charge désormais de la compétence tourisme…

 

Au plaisir de lire vos réactions,

 

Guillaume Cromer, ID-Tourism (suivez moi sur Twitter)